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En la paix un vrai Bassompierre,
Un vrai Machabée en la guerre,
Et, pour gouverner un état,
Nullement mol ministre, ou fat.
De tous ces présages célestes,
Aux peuples latins manifestes,
Et non pas forgés à plaisir
Par quelque drôle de loisir,
Il faut que je vous en raconte
Deux dont chacun faisait grand compte :
Quand Latin, comme de raison,
Se voulut faire une maison
(Car alors ce grand personnage
N’en avait qu’une de louage),
Un laurier aux feuillages verts,
Craignant peu le froid des hivers,
Moins encor les coups de tonnerre,
Se trouva dans l’arpent de terre
Où ce prince, franc et loyal,
Dessinait son Palais Royal.
A Phébus, qui porte guirlande,
Il en voulut faire une offrande,
Et la fit, car ce prince était
Ponctuel quand il promettait.
Ce laurier à la verte tête
Vit un jour percher sur son faîte
De mouches à miel un essaim ;
Je ne sais pas à quel dessein
Cette cohorte melliflue
Vint par l’air, en guise de nue,
Se loger à ciel découvert
Sur ce laurier vêtu de vert
Tant y a qu’elles s’y logèrent,
Et cire et miel y composèrent,
Dont depuis, durant plusieurs ans,
On fit d’excellents lavements,
Et force chandelles de cire,
Dont Latin se servait à lire.
Par ce prodige si nouveau,
Du roi se troubla le cerveau.