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Qui leur offusquait la prunelle
A la lune, alors que, nouvelle,
Un brouillas qui l’air épaissit
La rend blafarde ou l’obscurcit,
Ou bien à la nuit quand, obscure,
Elle rend tout d’une peinture.
Rien ne saurait être mieux dit ;
Et, ce néanmoins, moi, petit
Et très ridicule interprète,
Je dis, sans mépris du poète,
Qu’une lampe sous un boisseau,
Ou, si l’on veut, sous un chapeau,
Et même, si l’on veut, éteinte,
Est chose qui rend mieux, dépeinte,
Les lieux où marchait Aeneas
Que la lune avec son brouillas,
Ou la nuit quand elle est obscure,
Et rend tout de même peinture.
Finissons la digression
Et suivons la narration.
Nous avons laissé le bon sire,
Qui n’était pas en train de rire,
Et qui cheminait à tâtons
Après la vieille aux longs tétons.
On le reçut à grand cortège
Dans cet infernale Norvège :
Il fut complimenté d’abord
Par le Sommeil et par la Mort ;
Pour lui faire honneur, la camarde
Contre son humeur fut gaillarde
Et pour le Sommeil lui parla,
Qui cependant toujours ronfla.
Après, vinrent les Maladies,
Les faces toutes enlaidies,
Et puis quantité de vieillards,
Tous médisants et babillards,
Qui marchaient devant la Vieillesse,
Qui s’appuyait sur la Tristesse,
Laquelle tenait par la main
La Pauvreté, sœur de la Faim.