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Les oiseaux de Vénus la belle,
Quand il était visité d’elle.
Mais pour vesce ni huchement
Ils n’obéirent nullement,
Quoiqu’il ajoutât ces paroles :
"Beau couple de pigeons qui voles,
Si tu voulais t’aller jucher
Où je dois la branche arracher,
Qui doit faciliter l’entrée
Dans la ténébreuse contrée,
Où je veux, si je puis, entrer,
Quoi qu’on me puisse remontrer,
Je fonderais par chaque année,
Moi qui m’appelle maître Enée,
Cent boisseaux de vesce et de pois
Qu’on vous délivrerait par mois ;
Et vous, ô ma divine mère !
Par le secours de qui j’espère
Devenir empereur romain,
De grâce, tenez-y la main."
Inutile fut la promesse
De ce beau prometteur de vesce :
Les vénérables pigeonneaux,
De Vénus les sacrés oiseaux,
Sans rabattre un petit coup d’aile,
Fendirent le vent de plus belle ;
Lui se mit à doubler le pas,
Afin de ne les perdre pas.
Or, comme la couple volante
Le tenait la gueule béante,
Tête haute et les yeux ouverts,
Il donna deux fois à travers
De deux petits monceaux de pierres,
Tellement qu’il fit deux parterres ;
Mais aussitôt se relevant,
Il alla toujours poursuivant
Les pigeons, qui si bien volèrent
Qu’à tire-d’aile ils arrivèrent
Où l’air d’Enfer se fait sentir.
J’ai bien peur ici de mentir ;