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 de Didymaon."
A quoi Nise dit : "Par Mahom,
On le verra dessus ma tête
Chaque dimanche et chaque fête.
Meure, qui dira jamais mal
De grand seigneur si libéral ! "
La course étant ainsi finie,
Toute animosité bannie,
Et les coureurs gais et contents :
"Il ne faut point perdre de temps,
Dit Enée ; empoigne le ceste,
Quiconque aura du cœur de reste.
A quiconque s’y veut frotter,
Un bœuf paré pour le tenter
Sera le prix de la victoire.
Une épée à gaîne d’ivoire,
Outre un fort joli morion,
Sera le prix du champion,
Qui, par les coups de l’adversaire,
Sera contraint enfin de faire
Signe de ses deux bras lassés,
Qu’il en a trop, au moins assez."
Chacun eut grande retenue
A voir le ceste, dont la vue
Fit peur à ceux des regardants
Qui n’étaient pas des plus fendants.
Le grand Darès seul se présente,
Darès, à la taille géante,
Qui seul avec Pâtis jouait
A ce jeu, qui les gens rouait ;
Qui, pour célébrer la mémoire
Du vaillant Hector, eut la gloire
D’assommer, près de son tombeau,
Butès, aussi fort qu’un taureau
Et très expert en la gourmade,
Sans mensonge, ou bien par bravade
(Car on ne l’a jamais bien su),
Ce Butès se disait issu
D’Amiclus, grand brise-mâchoire,
Et fort renommé dans l’histoire.