Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/280

Cette page n’a pas encore été corrigée

De tous ses funèbres atours
Fit deux cent quatre-vingt-deux tours
Alentour des autels sans nombre.
Les dieux de la demeure sombre
Furent, quoique ni beaux ni bons,
Appelés par leurs trois cents noms.
Omis l’Erèbe ne fut mie,
Ni le Chaos, que Dieu bénie,
Ni la triple dame Hécaté,
De ceux dont l’esprit est gâté
La patronne, et cette patronne
L’est, dit-on, de mainte personne.
Puis, d’un petit vase de fer,
D’eau puisée au grand puits d’Enfer
Elle versa pour le moins pinte :
Je boirais plutôt de l’absinthe
Que d’une telle eau, me dût-on
Assommer à coups de bâton.
Elle fit bien d’autres mystères :
De plusieurs herbes mortifères
Elle parsema le bûcher ;
Puis un petit morceau de chair,
Qu’ont au front les fils des chevales,
Bon contre les vertus morales,
Et bon pour donner de l’amour,
Fut par elle aussi mis au jour.
Didon offrant aux Dieux la mole,
L’oeil égaré comme une folle,
Le pied droit nu, l’autre chaussé,
Et le vêtement retroussé,
Deux doigts au-dessous de la hanche,
Tenant l’autel de sa main blanche,
Attesta hautement les dieux,
Ceux de l’Enfer et ceux des Cieux,
Les astres et leurs influences,
Et leur fit force doléances,
De ce que leur influxion
Nuisait à son affection,
Et pourtant, comme étant bien sage,
Ni du penser ni du langage