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A l’un vous direz : « Mon fanfan, »
L’autre vous dira : « Ma maman ; »
Et, s’ils se mettent trop à braire,
Tout ce que vous avez à faire,
Mettez-les moi sur vos genoux
Et me les assommez de coups :
C’est le plus grand plaisir du monde.
Vous craignez qu’un défunt en gronde ?
Laissez-le gronder, s’il lui plaît,
En l’Enfer, où je crois qu’il est.
Il est bien oiseux, le beau sire,
De trouver sur tout à redire.
Quant à moi, je me trompe fort,
Si, quand un homme est raide mort,
Il prend garde à son épousée :
Ce n’est qu’une billevesée,
Un vrai conte à dormir debout,
Ou de nourrice, et puis c’est tout.
Je veux bien que le prince Hiarbe,
Par son épaisse et sale barbe,
Vous ait quelque dégoût donné,
Et que maint autre forcené
De ces roitelets de Lybie
Vous ait donné fort peu d’envie ;
Je trouve en votre aversion
Votre justification.
Mais pour celui-ci, qui vous touche,
Vous fait venir l’eau à la bouche,
Que vous ne faites que guigner,
Prenez-le-moi sans barguigner.
Encore un coup, il le faut prendre,
En essayer, et puis le rendre,
Si ce qui reluit n’est pas or.
De plus, considérez encor
Parmi quels barbares vous êtes,
Et la demeure que vous faites
Parmi ces peuples libyens,
La plupart visages de chiens.
Certes, l’entreprise est bien grande,
Si vous n’avez qui vous défende.