Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/187

Cette page n’a pas encore été corrigée

 yeux se mirent à pleuvoir ;
Je lui présentai mon mouchoir,
Dont elle s’essuya la face.
Je me composai la grimace
Quand je la vis pleurer ainsi,
Et tâchai de pleurer aussi ;
Mais jamais en jour de ma vie,
Quoique j’en eusse grande envie,
Je ne fus si dur à pleurer,
Dont je pensai désespérer.
J’étais en cet embarras, comme
Voici venir à nous son homme,
Suivi de cent hallebardiers,
Et d’autant de cranequiniers.
Dieu sait s’il eut beaucoup de joie,
Quand il vit tant de gens de Troie
Qu’il pensait n’être plus vivants.
Il salua tous mes suivants,
Et nous mena tous vers la ville.
Or, comme il a l’âme civile,
Il me voulut faire passer :
Nous fîmes, comme on peut penser,
Force compliments à la porte,
Et ce fut de si bonne sorte
Que, faisant des saluts bien bas,
L’un priant, l’autre n’entrant pas,
Nous nous couchâmes sur le ventre,
Lui, disant : « Maudit sois si j’entre ! »
Moi, disant : « Maudit sois aussi ! »
Mais nos gens, nous voyant ainsi,
Nous prirent et nous emportèrent.
Les uns et les autres entrèrent,
Et lors cria maître Hélénus :
 « Vous soyez les très bien venus ! »
Mes Troyens eurent grande joie
De voir cette petite Troie,
Et d’y remarquer le Xanthus,
Près duquel, battants ou battus,
Ils avaient joué de l’épée.
J’y reconnus la porte Scée,