Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/159

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il n’est qu’un mur bâti d’ais joints,
Large de trois pieds, plus ou moins.
Une terre, Thrace nommée,
Nation jusqu’aux dents armée
Dont les gens sont très malfaisants,
Jurant Dieu, battant paysans,
N’est guère loin de la Phrygie.
Elle fut autrefois régie
Par Lycurgue, homme de renom,
Qui savait décliner son nom,
Et quelque chose davantage,
L’arithmétique, l’arpentage,
Et faire entendre la raison
Au peuple, qui n’est qu’un oison.
Ce pays aimait fort le nôtre,
Et qui toquait l’un toquait l’autre.
Ces coupe-jarrets Thraciens,
Quand ils trouvaient des Phrygiens,
Leur ôtaient humblement la toque ;
Les Phrygiens, au réciproque,
Leur faisaient inclination
Avec grande dévotion ;
Et puis il s’entre-faisaient fête,
Se baisaient tête contre tête,
S’entre-disant : « Je suis à vous »,
Avec bras dessus, bras dessous.
C’est là que notre flotte arrive,
Ayant fait honneur à la rive,
Par l’avis des maîtres maçons,
Car des gens de toutes façons
S’étaient fourrés dans nos galères,
Et jusqu’à des apothicaires ;
Item, meneurs d’ours, des pédants,
Bateleurs, arracheurs de dents,
De comédiens une bande,
Et des danseurs de sarabande.
Or donc, ces maçons assemblés,
Et ceux de la flotte appelés,
Auxquels je disais : « Je vous prie »,
Ou : « Plaise à Votre Seigneurie »,