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Et ne va jamais qu’au galop.
Bref, cette princesse vaut trop.
Ayez grand soin de notre Iule,
Digne effet de notre copule :
Faites-lui montrer le latin,
Et quant est de notre destin
La grand-mère des dieux, Cybèle,
Me fait demeurer auprès d’elle
Pour être sa dame d’atour.
La sienne mourut l’autre jour
Avec quatre ou cinq de ses filles
Pour avoir mangé des morilles.
N’ayez donc plus de moi souci,
Je me trouve fort bien ici."
Là-dessus je pensai la prendre
Pour les derniers devoirs lui rendre ;
Mais, lui jetant les bras au cou,
Je pensai bien devenir fou,
Quand, l’ayant trois fois embrassée,
Trois fois de mes bras éclipsée,
Je connus n’avoir embrassé
Qu’un vain corps, un air condensé.
Or, n’aimant pas trop le fantôme,
Ni tout corps composé d’atome,
Je ne m’affligeai pas bien fort,
Puisqu’ainsi le voulait le sort.
Tôt après, jouant de la jambe,
De la pauvre ville qui flambe,
Dans les champs je me transportai,
Où Dieu sait comment je trottai
Jusqu’où m’attendait notre bande,
De petite faite bien grande.
Hommes, femmes, maîtres, valets,
Tous chargés comme des mulets,
En ce lieu s’étaient venus rendre,
Et m’avaient fait l’honneur d’attendre.
Que je fusse là revenu.
Sitôt qu’ils m’eurent reconnu,
A ma conduite ils se remirent,
A moi comme à roi se soumirent.