Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/609

Cette page n’a pas encore été corrigée


Scène III


NICANOR, ELISE, Gardes.


NICANOR.

   Où courez-vous, Princesse? arrestez un moment.
   Le pirate est repris, & gardé seurement,
   Et s'il faut que mon fils meure de ses blessures,
   Il mourra le Barbare apres mille tortures,
   A ce discours je voy vostre teint se changer,
   Il court pourtant encore un plus pressant danger.
   Si Paphos qu'on assiege, est enfin emportée,
   La vie au prisonnier sera bientost ostée.
   Ny vous qui le sauviez, ny mon fils qui m'est cher,
   Ny nul autre icy bas ne pourroit l'empecher.
   Son mestier de voleur laisse un grand privilege,
   Aux Princes qui l'ont pris, & pourtant qu'il assiege,
   Et l'on peut bien punir un Corsaire, ô Cieux!
   Sans attirer sur soy la cholere des Dieux;
   Mais par mon fils sauvé, par Paphos délivrée,
   Sa mort est seulement pour un temps differée,
   Si ne s'opposant plus au bonheur d'un Rival,
   Il ne consent sans feinte à cét Himen fatal,
   Qui rend mon fils heureux en possedant Elise,
   Autrement contre luy toute chose est permise.
   Tandis qu'à ce party vous le disposerez;
   Car Licas vous l'amene, & vous luy parlerez,
   Je cours où de Paphos la défence m'appelle,
   Gardes, suivez mon ordre, & qu'on me soit fidelle.



Scène IV


ELISE.

   Va Tyran! n'attens pas d'Orosmane & de moy,
   Que la crainte nous rende aussi lâches que toy,
   Dieux! qui de Nicanor souffrant les injustices,
   Semblez ses protecteurs, ou plustost ses complices,
   Par de rares vertus estre semblable à vous,
   Est-ce donc s'attirer vostre injuste co