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Et m'ôter tout d'un temps l'espérance donnée,

De vivre avecque vous un saint hyménée,

Qui ne ressentirait les divers mouvements,

Qu'excitent les dédains dans les coeurs des amants ?

Qui ne s'affligerait de vous voir si changée, [1415]

Vous par tant de serments à m'aimer engagée ?

Qui ne serait rêveur, qui ne serait confus,

Ou qui ne serait pas quelque chose de plus.

FLORE.

Vous tairez-vous Dom Sanche, et voulez-vous m'entendre ?

DOM-SANCHE.

Tenez donc des discours que je puisse comprendre. [1420]

FLORE.

Il faut vous contenter, Dom Sanche ! Vous pensez

Que je ne songe plus à vos crimes passés :

Vous vous trompez Dom Sanche, une fois offensée,

La mémoire à jamais en reste à ma pensée.

Léonore vous aime, et vous l'aimez aussi, [1425]

Elle a tout fait pour vous, et son père est ici,

Songez combien de sang vous perdîtes pour elle,

Les tourments endurés dans les fers de la belle ;

Faites servir Dom Sanche à votre utilité,

Et la perte du sang, et de la liberté. [1430]

À moins que d'épouser cette charmante fille,

Craignez l'inimitié de plus d'une famille ;

Mille fiers ennemis vous suivront en tous lieux :

Et vous êtes perdu : puis-je m'expliquer mieux ?

DOM-SANCHE.

Trop bien pour mon repos, belle, et cruelle Flore, [1435]

Trop bien pour me laisser quelque espérance encore.

Je pourrais comme amant vous déguiser mon coeur ;

Mais je veux vous répondre en Cavalier d'honneur,

J'aimai donc Léonore, et mon âme inconstante

Se prit aux doux attraits de sa beauté naissante ; [1440]

Je tâchai de gagner son inclination,

Et me trouvai l'objet de son aversion.

La résistance pique, et la croyant cruelle,

Par la seule raison de ce qu'elle était belle,

Et cette raison-là me la faisant aimer, [1445]

Son sévère dédain ne fit que m'enflammer,