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Où l’on obséde un homme au milieu d’une rue ;
Où l’on peut être pris par une malotrue.
Et que seroit-ce donc, si, séjournant ici,
Quelqu’autre chaque jour m’entreprenoit ainsi ?
Quoi ! si je me trouvois au milieu de cent d’elles,
Et qu’étant convoité de ces cent demoiselles,
Mon corps de cent côtés fût à la fois tiré,
Dom Blaize en cent morceaux se verroit déchiré ?
Ordugno, notre noce, ou je me trompe, est faite,
Je veux dès ce matin déloger sans trompette.

Ordugno.

Et tous vos beaux habits ?

D. Blaize.

Et tous vos beaux habits ?Nous nous en servirons.

Ordugno.

Et ceux de votre train ?

D. Blaize.

Et ceux de votre train ?Nous nous en déferons.

Ordugno.

On ne se défait pas de tels habits sans perte.

D. Blaize.

Veux-tu que je me jette en une fosse ouverte,
Et qu’étant marié, je sois encornaillé ?
Mais d’un bien plus grand soin je me sens travaillé ;
Il faudra que je trouve une excuse valable
À dom Cosme, un vieillard d’une humeur détestable.
Un bourreau d’esprit doux, qui vous accorde tout,
Et vous fait compliment en vous poussant à bout,
Qui ne manquera pas de louer ma prudence ;
Qui dira, quoiqu’il perde en ma chére alliance,
Qu’il rompra mon hymen tout comme il me plaira ;
Et dans le même tems qu’il me le promettra,
Le malheureux qu’il est, quoi que je puisse faire,
Malgré mes dents et moi se fera mon beau-pére.
Mortel eut-il jamais un embarras pareil !
Mais la nuit là-dessus nous donnera conseil,
Vous ne laisserez pas de toute votre adresse
De dire des douceurs à ma jeune maîtresse.
À propos, nous aurions besoin d’une clarté,
Pour bien voir son portrait que j’avois apporté :