Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/43

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Comment ! à sa maîtresse, à la barbe des gens,
Elle parle à l’oreille, à toute heure, en tout tems.
Loin de moi, loin de moi soubrette qui conseille :
On dispose du cœur de qui l’on a l’oreille ;
On dispose du corps de qui l’on a le cœur,
Cela fait, un mari se trouve sans honneur.
Va, va-t’en dans ma chambre, apporte une lumiére,
Je ne veux pas laisser le moindre coin derriére
Où je n’aye porté mes regards et mes mains.
Si j’allois y trouver le malheur que je crains,
Quelque Galant caché, je ferois rumeur telle,
Que mon maudit hymen se romproit par querelle.

D. Sanche, dans sa cachette.

Si cet extravagant cherche par-tout ainsi,
Il ne faut point douter qu’il ne me trouve ici ;
Mais je me puis sauver tandis qu’il ne voit goute.

D. Blaize.

J’entends marcher quelqu’un auprès de moi, sans doute.
Qui va là ?

D. Sanche.

Qui va là ?Qui va là toi-même !

D. Blaize.

Qui va là ?Qui va là toi-même !Es-tu mortel,
Ou fantôme ?

D. Sanche.

Ou fantôme ?Je suis homme vivant, et tel,
Que pour avoir osé profaner la demeure
Et l’honneur d’un Marquis, je t’étrangle sur l’heure.

D. Blaize.

Tu me serres la gorge, homme trop ponctuel !
Mais je t’étranglerai d’un effort mutuel.
Démon ! car tu ne peux être un homme ordinaire,
Après le mal cruel que tu me viens de faire.
Que cherches-tu céans ?

D. Sanche.

Que cherches-tu céans ?J’y cherche à t’y punir.

D. Blaize.

Et d’où prends-tu l’audace et le droit d’y venir ?