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D’entendre si souvent Ordugno répéter.
Sais-tu que c’est ainsi qu’on se fait maltraiter ?
Sais-tu que qui t’a fait, te pourra bien défaire ?

Ordugno.

Je crois n’avoir rien fait qui puisse vous déplaire.

D. Blaize.

Je l’ai fait favori, de page fort galeux,
Dont un meilleur que lui se tiendrait fort heureux.
Et le gredin qu’il est, se fait tirer l’oreille,
À cause que parfois à lui je me conseille.
Tous valets sont valets.

Ordugno.

Tous valets sont valets.Mais, Seigneur…

D. Blaize.

Tous valets sont valets. Mais, Seigneur…Il suffit.
Ne me va point chercher dans ton mauvais esprit
De mauvaises raisons, ou nous aurons querelle.
Viens à moi sans gronder alors que je t’appelle ;
Ne me parle jamais qu’étant interrogé,
Et jamais sans respect, ou bien prends ton congé.

D. Cosme.

Ne trouvez-vous pas bon, monsieur, que j’aille faire
Préparer une chambre à monsieur votre frére ?
Car je ne prétends pas qu’il loge hors de chez moi.

D. Blaize.

C’est fort mal prétendu, mon beau-pére.

D. Cosme.

C’est fort mal prétendu, mon beau-pére.Et pourquoi ?

D. Blaize.

Parce qu’en un logis où dormira ma femme,
De mon consentement ne dormira corps d’ame ;
Par corps d’ame j’entends tous parens, tous amis,
Tous valets : même aussi, s’il m’est ainsi permis,
Tous chiens, chats, et chevaux mâles, toute peinture
Qui représente au vif masculine figure.
Sans doute vous direz, et vous direz bien vrai,
Que je suis fort jaloux ; mais je m’en sais bon gré.