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Allons-y vitement.

DOM FÉLIX

Adieu, belle inhumaine.

LUCIE

Adieu parfait amant. [930]

LUCIE, seule

Nous voyons bien pourquoi, Madame la jalouse,

Vous souhaitez si fort que dom Félix m'épouse ;

C'est pour vous assurez votre futur Époux,

Dont vous voyez les voeux ne s'adresser qu'à nous.

Ah, je ne vois que trop par son morne silence, [935]

Qu'à vous voir seulement, il se fait violence ;

Au lieu, que par ses yeux attachés sur les miens,

Je vois qu'assurément il est dans mes liens.

Mais hélas ! Il me tient d'une étreinte aussi forte ;

S'il m'aime avec excès, je l'aime de la sorte : [940]

Mais s'il n'est pas à moi, personne ne m'aura ;

Mon père là-dessus fasse ce qu'il pourra,

Dom Félix là-dessus remue et Ciel et Terre,

Et ma soeur avec eux me dénonce la guerre,

Si je n'ai Dom Diègue à la barbe d'eux tous, [945]

Je veux bien n'épouser jamais qu'un vieil jaloux.

Haussant la voix.

Béatrix.


Scène VI

LUCIE
BÉATRIX

BÉATRIX

Me voici, Madame.

LUCIE

Écoute, j'aime,

Et pour te dire vrai, j'aime plus que moi-même

Ce jeune Cavalier qu'on destine à ma soeur,

Et je me trompe fort, ou je règne en son coeur, [950]

Au premier carrefour va louer une chaise :

De ceci, Béatris, il faut que l'on se taise :