Puisque vous l'épousez, vous l'avez bien éprise.
DOM FÉLIX
J'ai peur l'avoir courue, et qu'un autre l'ait prise ; [800]
Car aujourd'hui sa soeur m'a dit qu'assurément
Quelque chose pour moi la change étrangement ;
Et que bien à regret ce superbe courage
(Qui ne veut point d'un bien qu'un autre lui partage)
Se résout à la fin de m'admettre en son coeur ; [805]
Mais à condition que son père et sa soeur
Sauront la vérité de cette Dorothée.
Voici l'heure tantôt entre nous arrêtée,
Que je dois faire voir à Pedro d'Avila
Cette Fille, et de plus, certain Oncle qu'elle a, [810]
Qui l'a toujours nourrie, et qui lui sert de père :
Il est nécessiteux, et parce qu'il espère
Que s'il me rend content, je le régalerai,
Cet homme ne dira que ce que je voudrai,
Encor que Gentilhomme, il a l'âme vénale, [815]
En lui toute action qui profite, est loyale ;
Et sans son avarice, assurément je crois
Que sa Nièce eut bien pu se défendre de moi.
Voilà, mon cher ami, l'état de mon affaire,
Où j'ai d'abord trouvé le vent assez contraire ; [820]
Mais j'espère bientôt, dans un port assuré,
Partager avec vous un trésor désiré.
J'espère en votre esprit, dont je connais l'adresse,
Il pourra m'adoucir celui de ma tigresse ;
Lorsque vous la verrez, tâchez de l'obliger [825]
À ne se plaire plus à me faire enrager.
Allons-y de ce pas, aussi bien votre Hélène,
(Qui s'inquiète fort pour certaine migraine,)
Qui vous a pris tantôt, m'a prié mille fois
De vous y remener, lorsque je vous verrais. [830]
Ne faites pas languir plus longtemps une Amante
Qui témoigne pour vous une ardeur violente.
DOM DIÈGUE
Allons, je suis à vous dans un petit moment.
Alphonse, va quérir mes lettres promptement ;
Et songez à ...