Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LETTRE.

Ma chère épouse,

Quelques affaires m’empêchent de vous appeler de plus près de ce doux nom. Recevez-le d’où vous êtes, je vous le donne d’où je puis, et cependant je consens, et ma volonté est que cette lettre ait la force d’une promesse de mariage, en attendant que nous le consommions dans Madrid après la bénédiction du Prêtre.

Dom Blaize Pol, Marquis de la Victoire.

Louize.

Il entre, ce me semble, ici quelque mystére ;
Car, madame, il écrit de Madrid à son frére,
Son frère apparemment est aussi dans Madrid.

Stefanie.

Il n’est pas question de se lasser l’esprit
À deviner le sens, dont la lettre est écrite ;
Mais il est question que mon âme s’irrite ;
Qu’on se moque de moi, qu’on me fait enrager,
Et que je veux tout faire, afin de me venger.
Oui perfide, oui méchant, j’irai chez ta maîtresse,
Lui faire le récit de ta fausse finesse.
Louize, Olivarès, il faut me seconder,
À rompre cet hymen, ou bien le retarder ;
Mais ce n’est pas assez de rompre un hyménée,
Il faut bien davantage à ma rage obstinée :
Je veux après avoir fait manquer cet hymen,
Qu’il en meure le traître.

Louize.

Qu’il en meure le traître.Oui, qu’il en meure.

Olivarès.

Qu’il en meure le traître. Oui, qu’il en meure.Amen.

Stefanie.

Perdons le scélérat qui s’attaque à ma gloire.

Olivarès.

Soyons victorieux de la même victoire.