Ne vous parjurez point, je crois bien le contraire.
Puisque vous m'aimez bien, comment pouvez-vous faire
De semblables desseins, encore devant moi ?
Je fais voir mon amour, faisant ce que je dois,
C'est vous mériter peu que d'être sans courage. [1145]
Ô l'étrange discours à quoi l'amour m'engage !
Je rougis, ha ! Mon Dieu, ne me regardez point :
J'aime bien Dom Diègue, et je l'aime à tel point,
Que pour le conserver, je ne veux plus rien dire,
Je n'en ai que trop dit : adieu, je me retire. [1150]
Ha ! Madame, achevez le discours commencé :
Il était obligeant, mais vous l'avez laissé.
Puisqu'en si peu de temps vous changez ma fortune ;
C'est après avoir plu, signe que j'importune :
Je ne le cèle point, d'un tel mal combattu [1155]
Mon coeur désespéré manquera de vertu.
Je redoute bien moins une âme de Tigresse,
Que l'inégalité d'une belle Maîtresse.
De ce charmant discours, qui vous a détourné ?
Il promettait beaucoup, mais il n'a rien donné. [1160]
S'il a promis beaucoup, je tiendrai sa promesse,
Si j'avais moins d'amour j'aurais moins de faiblesse :
Puisque votre courage étonne mon amour,
Ne se hasarder point, c'est bien faire sa cour.
Si ce grand Fanfaron par malheur allait battre [1165]
Mon laquais, il faudrait l'assommer ou combattre ;
Je hasarde bien moins, empêchant son dessein.
On ne conserve pas un jugement bien sain,