Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/171

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il faut haïr le frère, il faut aimer la soeur, [1615]

Il faut croire l'amour, il faut croire l'honneur,

La raison veut aussi que je vous satisfasse.

Dom Pedre

À cet honneur insigne ajoutez une grâce,

Peut-être ignorez-vous, que j'aime votre soeur

Avec tous les respects, avecque tout l'honneur, [1620]

Qu'elle peut exiger d'un esclave fidèle :

Elle sait les tourments que j'ai soufferts pour elle,

Et que pour son sujet le destin a permis,

Le funeste accident qui nous rend ennemis :

Le Ciel me soit témoin, que défendant ma vie, [1625]

Quand sans votre secours elle m'était ravie,

Si j'eusse reconnu l'auteur d'un tel dessein,

J'eusse à son fer cent fois laissé percer mon sein,

Ou peut-être cherché mon salut en ma fuite,

Plutôt que repousser son ardente poursuite. [1630]

Je me vis attaqué d'un jeune homme en fureur,

Et comme il me pressait, avec plus de rigueur

Que les lâches poltrons, que nous mîmes en fuite,

Jugez où ma valeur se trouva lors réduite.

J'avais à me défendre, ou j'avais à mourir : [1635]

Prêt de périr moi-même, ou de faire périr,

Il est plus naturel de choisir l'un que l'autre,

Et c'est comme arriva mon malheur et le vôtre.

Mais Monsieur me donnant Cassandre, cet honneur

D'un ennemi vous fait un frère, un serviteur. [1640]

Le Comte

Vous aimez donc ma soeur, Dom Pedre ?

Dom Pedre

Je l'adore.

Le Comte

Elle est à vous, et moi je suis à Léonore.

Léonore

Mon Père, pardonnez.

Dom Félix

Tout n'a que bien été.

Hasardant votre honneur vous l'avez augmenté.

Le Comte

{{didascalie|à Dom