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Stefanie.

Je sais que bien souvent, il se promene ici.
Et c’est pour ce sujet que je m’y trouve aussi.
Afin qu’en m’y voyant, seule, à pied, sans livrée,
Il s’aille figurer ma conquête assurée,
Et que pour me connoître, il vienne m’approcher.

Louize.

Qu’espérez-vous par là ?

Stefanie.

Qu’espérez-vous par là ? Je lui veux reprocher,
Qu’il donne à tout.

Louize.

Qu’il donne à tout.Ma foi, ce n’est pas gain de cause,
Pour vos nobles desseins, il faut bien autre chose.

Stefanie.

Cela me peut servir à le faire expliquer ;
À connoître s’il m’aime, ou s’il se veut moquer.
Car puisque tout mon bien est ma seule industrie,
Je redoute sur-tout la contre-fourberie.

Louize.

Par ma foi, je le tiens aussi fourbe que nous.

Stefanie.

Mais il n’est pas aussi le seul but de mes coups.

Louize.

Ce financier coquet, que vous couchiez en joue,
Et qui ne vous hait pas, le valoit bien.

Stefanie.

Et qui ne vous hait pas, le valoit bien.Il joue,
Son humeur m’est suspecte ; on croit qu’il doit au roi,
Et n’est pas dans Madrid cru pour homme de foi.

Louize.

Et ce beau courtisan, qui vous suit à la piste ?

Stefanie.

Le madré veut savoir en quoi mon bien consiste.