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Ôte-toi.

Le Comte

tout bas à Léonore.

Tout à l'heure

Gagnez vite la rue, et delà ma demeure.

Dom Félix

Enfin donc, fils sans coeur, à quoi te résous-tu ?

Dom Pedre

À croire mon honneur, à croire ma vertu,

À garder ma parole, à venger mon offense. [925]

Dom Félix

Tu mets donc l'une et l'autre en égale balance ?

Tu lui fais perdre un frère, il suborne ta soeur ;

L'un est un déplaisir, l'autre, est un déshonneur ;

L'un ne veut qu'un combat, l'autre veut une vie,

L'un fait porter le deuil, et l'autre l'infamie. [930]

Vois, vois, comme je sais me venger, et sans toi.

Dom Pedre

voulant arrêter son Père.

Mon père, si jamais.

Dom Félix

Ne parle point à moi.

À part.

Je m'en vais enfermer cette imprudente fille

Dans sa chambre, et demain dans une austère grille.

Dom Félix sort.

Dom Pedre

Comte, tu te vois seul, et connais aisément, [935]

Que plusieurs nous pouvons te perdre en un moment,

Puisque je le pourrais seul, et sans avantage :

Mais je dois pour le moins t'égaler en courage.

Tu sais que perdre un frère, et perdre son honneur,

N'est pas perte pareille entre les gens de coeur. [940]

Ma générosité surpasse donc la tienne,

D'autant que ton offense est moindre que la mienne

Je paye avec usure, un bien que tu m'as fait :

Mais ce n'est pas assez que tu sois satisfait ;

Il faut que je le sois. Ta mort seule est capable, [945]

Si ton crime envers nous peut être réparable,