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Débauchés comme lui, dans une chambre seule,

Où toujours quelqu'un jure, ou dit des mots de gueule. [170]

L'hiver, le vent y donne autant que dans les champs,

Ils couchent quatre à quatre en deux lits fort méchants :

Les murs y sont parés de rondelles, d'épées,

De portraits de charbon, de toiles d'araignées.

Ces huit bons écoliers, ou plutôt huit bandits ; [175]

Chôment les Samedis comme les Vendredis.

Haïssent les leçons comme les Patenôtres,

Et ne font chaque jour que débaucher les autres.

La nuit venue, ils vont enlever des manteaux,

Plier quelque toilette, et jouer des couteaux, [180]

Ils se couchent fort tard, et se lèvent de même,

Une servante maigre, acariâtre et blême,

Sèche, ferrant la mule, et qui compte trente ans

Depuis qu'elle renonce à l'usage des dents,

Leur apprête à manger. Chacun y mange en Diable, [185]

Ou si l'on veut en chien. Un coffre y sert de table,

Du vin à quantité, peu de mets délicats,

Des Livres pleins de graisses y tiennent lieu de plats.

Quand l'un mange trop fort, les sept autres enlèvent

Ce qu'il a devant lui, le pillent, et s'en crèvent, [190]

S'entend, alors qu'ils ont prou de quoi se crever ;

Car souvent ce n'est que pas coup sûr que d'en trouver :

En peu de mots, voilà de votre fils la vie.

Léonore

De sa Relation, pour moi je suis ravie.

Dom Félix

Pour un sot de collège, il parle plaisamment. [195]

Mais n'a-t-il rien de bon, ce mauvais garnement ?

Crispin

De bon ! Il a tout bon, quoi que j'aie pu dire.

Il est de bonne humeur, il a le mot pour rire.

Quand il est question d'un discours sérieux,

Un Caton le Censeur ne le ferait pas mieux. [200]

Il est officieux, ne refuse personne,

Il prête sans regret, sans faire attendre donne,

Il est fort ponctuel alors qu'il a promis,

Civil quoique vaillant, et fait beaucoup d'amis,