Page:Scève - Délie, 1862.djvu/30

Cette page a été validée par deux contributeurs.
6
DELIE

Sacrifia auec l’Ame la vie.
Doncques tu fus, ô liberté rauie.
Donnée en proye a toute ingratitude :
Doncques eſpere auec deceue enuie
Aux bas Enfers trouuer béatitude.

IV.

Voulant tirer le hault ciel Empirée
De ſoy a ſoy grand’ ſatisfaction,
Des neuf Cieulx à l’influence empirée
Pour clorre en toy leur operation.
Ou ſe parfeit ta decoration :
Non toutesfoys ſans licence des Graces,
Qui en tes mœurs affigent tant leurs faces,
Que quand ie vien a odorer les fleurs
De tous tes faictz, certes, quoy que tu faces,
Ie me diſſoulz en ioyes, & en pleurs.

V.

Ma Dame ayant l’arc d’Amour en ſon poing
Tiroit a moy, pour a ſoy m’ attirer :
Mais ie gaignay aux piedz, & de ſi loing,
Qu’elle ne ſceut oncques droit me tirer.
Dont me voyant ſain, & ſauf retirer,
Sans auoir faict a mon corps quelque breſche :
Tourne, dit elle, a moy, & te deſpeſche.
Fuys tu mon arc, ou puiſſance, qu’il aye ?
Ie ne fuys point, dy ie, l’arc, ne la fleſche :
Mais l’œil, qui feit a mon cœur ſi grand’ playe.