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UN RENARD

vous n’ayez pris assez d’intérêt à mes personnages pour désirer savoir ce qu’ils sont devenus ?

— Ce n’est jamais l’intérêt qui me guide, répliquai-je, mais j’aime assez que chaque chose soit à sa place ; et mieux vaut savoir ce que ces gens-là font pour le moment, que de risquer de les rencontrer quelque part où ils n’auraient que faire, et où je pourrais me dispenser d’aller.

— Eh bien, Monsieur, cet ennemi que l’exquise raison de mon jeune ami l’avait appris à reconnaître, cet être chez qui le désœuvrement et l’orgueil ont civilisé la férocité et la barbarie, cet Homme, puisqu’il faut l’appeler par son nom, est venu appliquer à l’infortuné Cocotte une ancienne idée de Poule au riz, qui avait fait déjà bien des victimes parmi le Poules et parmi ceux qui les mangent, car c’est une détestable chose ; mais je ne m’en plains pas, il faut que justice se fasse !

Elle a succombé, et son malheureux amant, attiré par ses cris, a payé de sa vie en dévouement dont on n’a guère d’exemples chez nous. Je n’en connaissais qu’un, et l’autre soir, on m’a prouvé, plus clairement que deux et deux font quatre, que mon héros était bon à pendre, ce qui fait que j’ai maintenant le cœur très-dur, de peur d’être sensible injustement.

— On ne saurait prendre trop de précaution. Et le Coq ?

— Tenez, écoutez ; le voilà qui chante !

— Bah ! le même ?

— Et qu’importe, mon Dieu ! que l’individu soit changé,