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PRIS AU PIÉGE.

c’est un dédommagement pour bien des gens, et peut-être l’éprouverais-je. Quoi qu’il en soit, vous devez avoir maintenant une idée de ma triste existence, et ma seule ambition était d’être plaint quelque jour par une âme d’élite. La seule fois que j’aie rencontré Cocotte, et que j’aie pu lui parler librement de mon amour, si je puis donner le nom de liberté à l’embarras qui enchaînait mes mouvements et ma langue, elle m’a témoigné, comme je m’y attendais, un si profond dédain, elle a répondu à mes protestations et à mes serments par un ton de raillerie si froide, que j’ai juré de mourir plutôt que de l’importuner davantage du récit de mon déplorable amour. Je me contente de veiller sur elle et sur son amant, et d’éloigner de cette maison les Animaux nuisibles et malfaisants. Je n’en redoute plus qu’un, et, malheureusement, celui-là, il est partout, et presque partout il fait du mal. C’est l’Homme.

— Maintenant, ajouta-t-il, permettez que je me sépare de vous. Voici l’heure où le soleil va se coucher, et je ne dormirais pas si je manquais le moment où je puis voir Cocotte sauter gracieusement sur l’échelle qui monte au poulailler. Souvenez-vous de moi, Monsieur, et quand on vous dira que les Renards sont méchants, n’oubliez pas que vous avez connu un Renard sensible, et, par conséquent, malheureux.

— Est-ce fini ? dis-je.

— Sans doute, repris Breloque, à moins cependant que