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PRIS AU PIÉGE.

j’espère le venger de tous ses ennemis, en vous prouvant qu’un Renard peut être aussi gauche, aussi stupide, aussi absurde qu’on doit le désirer, quand l’amour s’en mêle. Pour le moment, j’avais l’honneur de vous demander votre opinion relativement à la chasse aux Papillons. J’y reviens.

Je fis un geste d’impatience auquel il répondit par un geste suppliant qui me désarma. D’ailleurs, qui ne se laisserait pas séduire aux prestiges d’une chasse aux Papillons ? Ce n’est pas moi. J’eus l’imprudence de le lui laisser voir.

Breloque, satisfait, prit une seconde fois du tabac, et se coucha à demi dans son fauteuil.

— Je suis heureux, Monsieur, dit-il avec expansion, de vous voir épris des plaisirs vraiment dignes, vraiment parfaits de ce monde. Connaissez-vous un être plus heureux et en même temps plus recommandable pour ses amis et pour ses concitoyens que celui qu’on rencontre dès le matin, haletant et joyeux, battant les grandes herbes avec sa freloche, portant à sa boutonnière une pelote armée de longues épingles pour épingler adroitement et sans lui causer la moindre douleur (car il ne s’en est jamais plaint) l’insecte ailé que le zéphir emporte ? Pour moi, je n’en connais pas qui m’inspire une confiance plus entière, avec lequel j’aimasse mieux passer ma vie, qui me soit plus sympathique en tous points, en un mot, que j’estime davantage. Mais nous n’en sommes pas là-dessus, et je