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D’UN MOINEAU DE PARIS.

de profondeur, et chaque bataillon de six rangs avait en tête un capitaine qui portait sur son corselet la décoration du Sidrach, emblème du mérite civil et militaire, une petite étoile en cire rouge. Derrière les porte-aiguillons, allaient les essuyeuses de la reine, commandés par la Grande-Essuyeuse ; puis la Grande-Échansonne avec huit petites échansonnes, deux par quartier ; la Grande-Maîtresse de la loge royale suivie de douze balayeuses ; la Grande-Gardienne de la cire et la Maîtresse du miel ; enfin la jeune reine, belle de toute sa virginité. Ses ailes, qui reluisaient d’un éclat ravissant, ne lui avaient pas encore servi. Sa mère, Tithymalia XVII, l’accompagnait ; elle étincelait d’une poussière de diamants. Le corps de musique suivait, et chantait une cantate composée exprès pour le départ. Après le corps de musique, venaient douze gros vieux Bourdons qui me parurent être une espèce de clergé. Enfin dix ou douze mille Abeilles sortirent se tenant par les pattes. Tithymalia resta sur le bord de la ruche, et dit à sa fille ces mémorables paroles :

— C’est toujours avec un nouveau plaisir que je vous vois prendre votre volée, car c’est une assurance que mon peuple sera tranquille, et que…

Elle s’arrêta dans son improvisation, comme si elle allait dire quelque chose de contraire à la politique, et reprit ainsi :

— Je suis certaine que, formée par nos mœurs, instruite de nos coutumes, vous servirez Dieu, que vous ré-