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D’UN MOINEAU DE PARIS.

instruite, que je rencontrai, m’avait indiqué le régime des Fourmis comme le gouvernement modèle ; vous comprenez combien j’étais curieux d’étudier ce système, et d’en découvrir les ressorts.

Chemin faisant, je vis beaucoup de Fourmis, voyageant pour leur plaisir : elles étaient toutes noires, très-propres et comme vernies, mais sans aucune individualité. Toutes se ressemblaient. Qui voit une seule Fourmi, les connaît toutes. Elles voyagent dans une espèce de fluide formique qui les préserve de la boue, de la poussière, si bien que sur les montagnes, dans les eaux, dans les villes, rencontrez-vous une Fourmi, elle semble sortir d’une boîte, avec son habit noir bien brossé, bien net, ses pattes vernies et ses mandibules propres. Cette affectation de propreté ne prouve pas en leur faveur. Que leur arriverait-il donc sans ce soin perpétuel ? Je questionnai la première Fourmi que je vis : elle me regarda sans me répondre, je la crus sourde ; mais un Perroquet me dit qu’elle ne parlait qu’aux bêtes qui lui avaient été présentées.

    amèrement les magnifiques constructions cyclopéennes auxquelles elle coopérait, et sur le corail desquelles devait reposer un nouveau continent. Elle m’expliqua même que le gouvernement formique les subventionnait, afin d’avoir le droit d’occuper les nouvelles terres aussitôt qu’elles apparaissent à la surface des eaux. Les Friquets de Paris prendront sans doute en considération cette note, due aux confidences de ce membre excessivement distingué de la République Polypéenne qui fait des ruches sous-marines assez solides pour briser des vaisseaux. Néanmoins la jolie Coralline resta sans réponse quand je lui demandai sur quoi reposait les immenses bâtiments de sa nation.