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L’OURS.

fut de fournir le sujet d’un feuilleton à tous les journalistes de la capitale. Car c’est là le terme où, depuis vingt ans, viennent aboutir tous les grands événements politiques, religieux, philosophiques et littéraires de la savante Europe.

Le lendemain nous nous embarquâmes pour la France. Mon étoile voulut que lord B… fit un détour pour aller visiter les ruines de Nimes. Un soir qu’il était assis, près de cette ville, au pied d’une vieille tour, je profitai de la rêverie où il était plongé pour m’élancer avec la rapidité d’une avalanche au fond de la vallée. Pendant quatre jours et quatre nuits, je bondis de montagne en montagne, sans regarder une seule fois derrière moi. Enfin, le quatrième jour au matin, je me retrouvai dans les Pyrénées. Dans l’excès de ma joie, je baisai la terre de la patrie ; puis je m’acheminai vers la caverne où j’avais commencé de respirer le jour. Elle était habitée par un ancien ami de ma famille. Je lui demandai des nouvelles de mon père et de ma mère. — Ils sont morts, me dit-il. — Et Karpolin ? — Il est mort. — Et Lamarre, et Sans-Quartier ? — Ils sont morts[1]. — Après avoir donné quelques larmes à leur mémoire, j’allai me fixer sur le Mont-Perdu. Vous savez le reste.

  1. C’est une erreur. Karpolin, Lamarre et Sans-Quartier vivent encore. Ils font partie de la troupe du théâtre de la barrière du Combat, et jouent tous les dimanches dans l’emploi des gladiateurs.
    note du rédacteur en chef.