Page:Scènes de la vie privée et publique des animaux, tome 1.djvu/237

Cette page a été validée par deux contributeurs.
139
MÉDECINS.

particulièrement de ce dernier trait. Vous souriez ; vous me soupçonnez de gourmandise. — Pourquoi aime-t-on mieux croire aux défauts de son semblable qu’à ses besoins ? On n’ose pas lui reprocher de vivre, mais on lui sait mauvais gré d’avoir faim. — Si je me plains, encore une fois, ce n’est pas par gourmandise, mais cela humilie d’être mis au régime comme un simple et vil écolier malade de paresse, et qu’on traite par l’économie domestique. Je contribuai beaucoup, je m’en accuse, à faire nommer une commission chargée d’ouvrir une enquête et de constater les faits. Vous ne devinerez jamais sur quels imbéciles,… pardon, messieurs, je voulais dire sur quels Animaux les choix tombèrent : sur des Linottes et sur des Taupes. Il est vrai qu’on leur recommanda l’attention et la clairvoyance. La commission, pénétrée de cette vérité fondamentale, que les malheureux n’ont guère les moyens de rester désintéressés dans leurs plaintes, imagina de s’adresser exclusivement aux personnes présumées coupables. Je ne sais ce qui se passa, mais bientôt une bonne majorité, composée de tous les Animaux qui n’avaient rien écouté, décida que l’affaire était entendue. Un rapporteur fit un méchant travail dont il fut magnifiquement récompensé, et toute la commission après lui : et ce fut tout. Mais j’aboyai, je hurlai, je fis le mécontent ; beaucoup de mes voisins et amis crurent me devoir de faire comme moi ; l’agitation devint générale ; les Animaux versés en politique crurent un instant qu’ils