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HISTOIRE

Il n’y avait pas à répliquer, et la fuite était impossible. J’obéis.

— Tous les Animaux sont frères dis-je au Bœuf et au Chien en les abordant ; ce Coq est un duelliste, vous ne souffrirez pas qu’il m’assassine, mon sang retomberait sur votre tête : je ne me suis jamais battu, et j’espère encore ne me battre jamais.

— Bah ! bah ! me dit le Chien, ceci est la moindre des choses, il y a commencement à tout. Votre candeur m’intéresse, et je veux vous servir de témoin. Maintenant que je réponds de vous, il y va de mon honneur que vous vous battiez : vous vous battrez donc.

— Vous êtes trop honnête, lui répondis-je, et je suis touché de votre procédé, mais j’aime mieux ne pas trouver de témoin ; je ne me battrai pas.

— Vous l’entendez, cher Bœuf ! reprit mon adversaire exaspéré ; dans quel temps vivons-nous ! c’est vraiment incroyable. Vous verrez qu’à force de lâcheté on triomphera de nous, et que les forts devront subir la tyrannie des faibles et tout endurer d’eux.

Le Bœuf impitoyable beugla en signe d’approbation, et je demeurai confondu.

Ces Animaux domestiques ne valent pas mieux que les Hommes, pensai-je.

— Mourir pour mourir, me dit le Chien en me prenant à l’écart, mieux vaut mourir les armes à la main ; entre nous soit dit je n’aime pas ce Coq, et mes vœux sont pour vous :