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L’HOMME QUI A RÉUSSI

frotte l’œil ; un des jeunes gens de l’état-major vient à moi, je ne sais plus ce qu’il me dit, enfin c’était une affaire. Je n’aime pas les duels, je ne me battrais pour rien au monde, excepté pour mon idée. Oh non, je n’aime pas les duels, je ne suis pas militaire, pas du tout ; aussi sur le terrain, j’étais dans un état ! je ne savais pas où j’étais. Ce n’est pas gai ! avec ça je ne sais pas un mot d’escrime, je n’ai pas travaillé ça. On me met une épée dans la main, la tête me tourne, je crois tenir la queue d’une poële, je tourne, je fais ça, il s’avance sur moi. Je ne sais pas comment ça se fait, je l’ai tué ; les témoins ont prétendu qu’ils ne connaissaient pas ce coup-là. Aussi j’ai failli être poursuivi, mais on a étouffé l’affaire et l’on m’a envoyé comme attaché de troisième classe à Birmingham. Qu’est-ce que j’ai fait à Birmingham ? Toujours la même chose. Quand vous avez une idée, il faut la suivre. J’ai fait des pommes de terre soufflées. Rapport favorable au ministère des affaires étrangères, deuxième rapport très flatteur. Il y a eu des lords qui sont venus ; ils étaient très contents les lords.

Mais il y a la femme d’un gros fabricant de rasoirs (on fait des millions sterling dans cette maison-là)… Enfin cette dame a fait un éclat pour moi. Alors on m’a nommé deuxième classe au Japon. Au Japon ? J’ai fait des pommes soufflées ; on m’a rappelé ici et je suis de première classe. La valse commence. (Fausse sortie.) Ayez une Idée et suivez-la. Je vais vous expliquer comment ça se fait des pommes soufflées… ça ne vous servira à rien, c’est éventé. (Ah ! cette valse.) Je n’ai pas le temps… un dernier conseil… ayez votre idée à vous et suivez-la, (Marquise, je suis à vous !) et vous réussirez.


FIN DE L’HOMME QUI A RÉUSSI