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L’AFFAIRE DE LA RUE BEAUBOURG






À Coquelin-Cadet.



L’AVOCAT, d’un ton éloquent.

Et d’ailleurs, messieurs de la cour, messieurs les jurés, oui, nous avons assassiné, lâchement assassiné même, avec préméditation, avec astuce. Et si la victime a survécu à notre attentat, c’est par un malheur… (se reprenant.) c’est par un effet de la Providence dont les voies sont impénétrables. — Maintenant, j’en appelle à chacun de vous messieurs de la Cour, messieurs les jurés… vous avez vu il n’y a qu’un instant la victime s’avancer à la barre parfaitement guérie de sa blessure. Qu’est-ce que disait cette victime manquée ? Oh ! mon Dieu ! rien de mal ! ces êtres-là ont ils jamais pensé rien de bien ou de mal. Vous l’avez vu se présenter à vous avec cet air bienveillant particulier aux personnes ineptes, vous avez cru voir un pâle reflet de ces types à la mode dont on s’égaie dans les vaudevilles et dans les chansons. (Il fredonne quelques mesures de l’Amant d’Amanda.) J’ai vu, ne le niez pas ! la stupeur d’abord et ensuite le profond ennui se peindre sur vos visages, quand les bras ballants, l’œil vague, il a ôté son carreau… qui ne lui sert à rien, il n’est pas myope ! Tenez, permettez-moi, pour mieux rappeler à