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DIT AGRICOLE


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CRÉDIT AGRICOLE


en France ont ou recours à des intermédiaires ])lus ou moins obligeants, plus ou moins désintoressés, qu’elles ont parfois fait surgir à grand’peine, et qui jouent pour elles l’office de banque d’escompte. Ajoutons, cependant, avec M. de Hocquigny, qu’une observation capitale a été faite très générale- ment  : c’est que dès que se fonde une insti- tution de crédit agricole, les dépôts y affluent, malgré la concurrence des caisses d’épargne, et que souvent ils précèdent même les demandes d’emprunt. Ce fait est du plus heureux augure pour l’avenir du crédit agricole.

Pour que les nouvelles sociétés de crédit puissent fonctionner, la loi exige le verse- ment du premier quart du capital souscrit. Et elle ajoute  : « Dans le cas où la société serait constituée sous forme de société à capital variable, le capital ne pourra être réduit par les reprises des apports des socié- taires sortants au-dessous du capital de fon- dation. » En prévision de débuts difficiles, on a donc intérêt à fixer le capital initial à un chiffre très bas, 10 000 francs ou 20 000 francs, constitué par des parts nomi- natives de faible valeur, de 100 francs par exemple  ; il sera toujours loisible et facile de le relever ensuite, au fur et à mesure que le développement des opérations l’exigera.

Ce capital n’est guère qu’une garantie vis- à-vis du banquier de la société de crédit  ; les prêts sont réalisés sur les capitaux réalisés par d’autres voies, soit au moyen des dépôts en comptes courants ou imités de ceux des caisses d’épargne avec ou sans intérêts, soit par l’emprunt direct à des capitalistes, ou encore par la vente d’obligations agricoles émises par la caisse de crédit et qui doivent aisément se placer dans le public, dès que l’on sera un peu familiarisé avec ces nouveaux titres, similaires d’ailleurs de ceux de même nature déjà mis en circulation par les so- ciétés industrielles, les compagnies de che- mins de fer, les municipalités et surtout le Crédit foncier.

Cette variété même des procédés à employer indiqués par l’article premier donne la cer- titude que les capitaux de roulement ne| feront pas défaut. Le capital libéré partiellement seulement no joue qu’un rôle secondaire  ; les versements non appelés augmentent la garantie que la caisse de crédit peut offrir. 11 ne faut donc pas beaucoup de capitaux pour pouvoir réaliser les opérations de cré- dit agricole prévues par la loi de 1894, l’im- portant est de s’assurer le concours d’une banque d’escompte sérieuse qui accepte le papier ainsi créé.

La Société départementale d’encourage-


ment à l’agriculture de Montpellier a adopté, pour la création d’une caisse de crédit mu- tuel, des bases qu’il nous parait intéressant de signaler ici.

Afin de familiariser d’abord sa clientèle avec l’institution nouvelle, elle s’est active- ment employée, avant tout, à créer dans les centres agricoles les plus importants du dé- partement de l’Hérault, des syndicats agri- coles qui dépendent d’un bureau central établi au chef-lieu. De telle sorte qu’elle s’assure ainsi une clientèle naturelle pour sa caisse de crédit et une connaissance parfaite de la solvabilité de ses emprunteurs. I.a pratique obligatoire du crédit personnel en matière de crédit mobilier agricole devient par là même sans inconvénient sérieux.

Les banques ordinaires acceptent facile- ment dans ces conditions le papier émis par les nouvelles institutions de crédit, et le taux des pr>’’ts reste à peine supérieur à ce- lui de la Banque de France de un à un et demi pour cent  ; elles y trouvent d’ailleurs des éléments d’accroissement de leur clien- tèle ordinaire.

Les opérations de la Société sont exclusi- vement limitées aux membres des syndicats affiliés. Pour se faire faire des avances par la caisse, il faut en justifier l’utilité agricole et se faire cautionner par une tierce per- sonne ou déposer des titres en garantie. Les statuts prévoient, en outre, l’escompte des efTets souscrits par les syndicataires, la ga- rantie des achats qu’ils font vis -à-vis de leurs fournisseurs, en escomptant par exemple des traites fournies par ceux-ci sur leurs clients syndicataires. Et, enfin, ils prévoient aussi les opérations d’avances sur des mar- chandises ou denrées vendues par les adhé- rents et dont le payement aura été ditteré. Cette opération est de rigueur presque dans tout le vignoble languedocien où, d’après les usages consacrés, les acheteurs de vins payent seulement un acompte au vendeur au moment du contrat et se libèrent ensuite par fractions suivant la rapidité de l’enlèvement du liquide, enlèvement qui peut se prolonger de longs mois parfois.

A Amiens, à Remiremont, à Nimes, à Aix, à Die, Épinal, Genlis, Besançon, un peu par- tout, ces caisses mutuelles conformes à la loi de 1894 se sont rapidement propagées, et les jjremiers bilans déjà publiés démontrent leur pleine réussite.

Il resterait encore cependant à autoriser, par une modification de nos lois, les caisses d’épargne à faire fructifier régulièrement leurs fonds par cette voie. Ce serait pour elles un placement avantageux, bien vu de leur clientèle, et qui dégagerait le Trésor


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