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LIVRE PREMIER. — CHAPITRE III.

CHAPITRE III.

Ce que c’est qu’un capital productif, et de quelle manière les capitaux concourent à la production.

En continuant à observer les procédés de l’industrie, on ne tarde pas à s’apercevoir que seule, abandonnée à elle-même, elle ne suffit point pour créer de la valeur aux choses. Il faut, de plus, que l’homme industrieux possède des produits déjà existans, sans lesquels son industrie, quelque habile qu’on la suppose, demeurerait dans l’inaction. Ces choses sont :

1o les outils, les instrumens des différens arts. Le cultivateur ne saurait rien faire sans sa pioche ou sa bêche, le tisserand sans son métier, le navigateur sans son navire.

2o les produits qui doivent fournir à l’entretien de l’homme industrieux, jusqu’à ce qu’il ait achevé sa portion de travail dans l’œuvre de la production. Le produit dont il s’occupe, ou le prix qu’il en tirera, doit, à la vérité, rembourser cet entretien ; mais il est obligé d’en faire continuellement l’avance.

3o les matières brutes que son industrie doit transformer en produits complets. Il est vrai que ces matières lui sont quelquefois données gratuitement par la nature ; mais le plus souvent elles sont des produits déjà créés par l’industrie, comme des semences que l’agriculture a fournies, des métaux que l’on doit à l’industrie du mineur et du fondeur, des drogues que le commerçant apporte des extrémités du globe. L’homme industrieux qui les travaille est de même obligé de faire l’avance de leur valeur.

La valeur de toutes ces choses compose ce qu’on appelle un capital productif.

Il faut encore considérer comme un capital productif la valeur de toutes les constructions, de toutes les améliorations répandues sur un bien-fonds et qui en augmentent le produit annuel, la valeur des bestiaux, des usines, qui sont des espèces de machines propres à l’industrie.

Les monnaies sont encore un capital productif toutes les fois qu’elles servent aux échanges sans lesquels la production ne pourrait avoir lieu. Semblables à l’huile qui adoucit les mouvemens d’une machine compliquée, les monnaies, répandues dans tous les rouages de l’industrie humaine, facilitent des mouvemens qui ne s’obtiendraient point sans elles. Mais,