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LIVRE TROISIÈME. — CHAPITRE XI.

c’est-à-dire, sur le pied de vingt fois la rente, alors le rachat est un peu plus long ; mais cette difficulté même est un signe du bon état du crédit. Si au contraire le crédit chancelle, et que pour la même somme on puisse racheter une plus forte somme de contras, alors l’amortissement peut avoir lieu à un terme plus rapproché. De façon que plus le crédit décline, et plus une caisse d’amortissement a de ressources pour le remonter, et que les ressources qu’elle offre ne s’affaiblissent qu’autant que le crédit public a moins besoin de son secours.

À l’aide d’une semblable caisse, un gouvernement peut soutenir le prix des effets publics, et par conséquent emprunter à de meilleures conditions. C’est sans doute ce qui a fait dire à Smith, que les caisses d’amortissement, qui avaient été imaginées pour la réduction de la dette, ont été favorables à son accroissement.

On peut ajouter que les intérêts payés par le trésor, et mis en réserve par la caisse, sont un appât qui provoque de nouvelles dépenses pour lesquelles on n’ose avoir recours à de nouveaux emprunts. Les fonds des caisses d’amortissement d’Angleterre et de France ont été, par diverses lois, détournés de cette manière, de l’emploi auquel ils avaient été destinés, et la nation a perdu ainsi le fruit du sacrifice supplémentaire qu’on lui avait demandé en empruntant.

Mais en supposant même que le fonds d’amortissement pût être religieusement respecté, en supposant des législatures parfaitement indépendantes et capables d’opposer, à toutes les époques, une résistance inébranlable aux propositions des ministres, une caisse d’amortissement est une institution qui entraîne des frais, des abus, et qui ne rend effectivement aucun service quand l’état est bien administré.

Pour un état, comme pour un particulier, il n’y a pas deux moyens de s’affranchir de ses dettes. Cet unique moyen est d’y consacrer l’excédant de ses revenus sur ses dépenses. Les dépenses atteignent-elles le revenu ? la dette n’est pas diminuée, quoi qu’on fasse ; elle est même augmentée s’il y a un excédant du côté de la dépense. Les revenus excèdent-ils la dépense ? le procédé le plus expéditif et le moins coûteux, est d’employer immédiatement cet excédant au rachat d’une partie des obligations de l’état. La manœuvre des intérêts composés n’est qu’un pur charlatanisme. Quand l’état est assez heureux pour avoir cette année un excédant de vingt millions sur ses recettes, et qu’il rachète en conséquence un million de ses rentes, n’a-t-il pas ce million à payer de moins l’année prochaine ? et si ses recettes et ses dépenses sont encore dans la même