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PRÉLIMINAIRE.

est plus important encore, nos jeunes publicistes couronnent leurs études en s’initiant, par des travaux particuliers, aux vérités qui leur dévoilent le mécanisme des sociétés. On est étonné de leurs progrès, quand on compare la plupart des écrits périodiques de l’époque où nous sommes, de même que les ouvrages qui se publient sur la politique, l’histoire, les voyages, les finances, le commerce et les arts, avec les écrits du même genre publiés seulement dix ans auparavant. Ceux de ces ouvrages qui décèlent une ignorance complète des principes de l’économie politique, ne fixent pas un instant les regards du public. Lorsque les jeunes gens qui maintenant sont des élèves, se trouveront répandus dans toutes les classes de la société, et élevés aux principaux postes de l’administration, les opérations publiques seront bien meilleures que par le passé. Les gouvernans comme les gouvernés, prendront pour règle des principes plus uniformes ; ce qui amènera tout naturellement moins d’oppression d’un côté et plus de confiance de l’autre.

Mais ce qui a surtout contribué aux progrès de l’économie politique, ce sont les circonstances graves dans lesquelles le monde civilisé s’est trouvé enveloppé depuis quarante ans. Les dépenses des gouvernemens se sont accrues à un point scandaleux ; les appels que, pour subvenir à leurs besoins, ils ont été forcés de faire à leurs sujets, ont averti ceux-ci de leur importance ; le concours de la volonté générale, ou du moins de ce qui en a l’air, a été réclamé, sinon établi, presque partout. Des contributions énormes, levées sur les peuples sous des prétextes plus ou moins spécieux, n’ayant pas même été suffisantes, il a fallu avoir recours au crédit ; pour obtenir du crédit, il a fallu montrer les besoins comme les ressources des états ; et la publicité de leurs comptes, la nécessité de justifier aux yeux du public les actes de l’administration, ont produit dans la politique une révolution morale dont la marche ne peut plus s’arrêter.