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DE LA CONSOMMATION DES RICHESSES.

Le Brésil est un pays abondant en denrées qui se conserveraient et s’emporteraient au loin, si l’on pouvait les saler. Les pêcheries y sont très-abondantes, et les bestiaux s’y multiplient si facilement, qu’on y tue un bœuf pour la peau seulement. C’est de là que sont approvisionnées, en partie, les tanneries d’Europe. Mais l’impôt sur le sel empêche qu’on n’y emploie la salaison pour conserver et exporter la viande et le poisson ; et pour quelques cent mille francs qu’il rapporte au fisc, il nuit d’une manière incalculable aux productions de ce pays, et aux contributions que ces productions pourraient payer.

Par la même raison que l’impôt, agissant comme ferait une amende, décourage les consommations reproductives, il peut décourager les consommations stériles, et alors, il produit le double bien de ne prendre point une valeur qui aurait été employée reproductivement, et celui d’éloigner de cette inutile consommation, des valeurs qui peuvent être employées plus favorablement pour la société. C’est l’avantage de tous les impôts qui portent sur des objets de luxe[1].

Quand le gouvernement, au lieu de dépenser le produit des contributions levées sur les capitaux, les emploi d’une façon reproductive, ou lorsque les particuliers rétablissent leurs capitaux par de nouvelles épargnes, alors ils balancent, par un bien opposé, le mal que fait l’impôt.

C’est placer l’impôt d’une manière reproductive, que de l’employer à créer des communications, creuser des ports, élever des constructions utiles. Plus rarement les gouvernemens placent directement dans les entreprises industrielles une partie des valeurs levées par les contributions. Colbert le fit quand il prêta aux fabricans de Lyon. Les magistrats d’Hambourg et quelques princes allemands versaient des fonds dans des entreprises industrielles. L’ancien gouvernement de Berne plaçait, dit-on, chaque année une partie de ses revenus.

5o Ceux qui sont plutôt favorables que contraires à la morale, c’est-à-dire aux habitudes utiles à la société.

  1. Lorsqu’on est obligé de frapper d’impôt une certaine consommation, ou une industrie qu’on ne veut cependant pas détruire, on doit la charger d’abord légèrement, et augmenter le fardeau avec lenteur et précaution. Veut-on, au contraire, réprimer, détruire une consommation ou une industrie fâcheuse ? de prime-abord il faut la frapper de tout l’impôt qu’elle doit subir.