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DE LA CONSOMMATION DES RICHESSES.

sances ? Est-il nécessaire qu’on enseigne à ses frais toutes celles qu’il est de son intérêt que l’on cultive ? Deux questions dont la solution peut être demandée à l’économie politique.

Quelle que soit notre position dans la société, nous sommes perpétuellement en rapport avec les trois règnes de la nature. Nos alimens, nos habits, nos médicamens, l’objet de nos occupations et de nos plaisirs, tout ce qui nous environne enfin, est soumis à des lois ; et mieux ces lois sont connues, plus sont grands les avantages qu’en retire la société. Depuis l’ouvrier qui façonne le bois ou l’argile, jusqu’au ministre d’état, qui d’un trait de plume règle ce qui a rapport à l’agriculture, aux haras, aux mines, au commerce, chaque individu remplira mieux son emploi s’il connaît mieux la nature des choses, s’il est plus instruit.

De nouveaux progrès dans nos connaissances procurent, par la même raison, un accroissement de bonheur à la société. Un nouvel emploi du levier, ou de la force de l’eau, ou de celle du vent, la manière de diminuer un simple frottement, peuvent influer sur vingt arts différens. L’uniformité des mesures, auxquelles les sciences mathématiques ont fourni une base, serait utile au monde commerçant tout entier, s’il avait la sagesse de l’adopter. La première découverte importante qu’on fera dans l’astronomie ou la géologie, donnera peut-être le moyen de connaître plus exactement et plus facilement les longitudes en mer, et cette facilité influera sur le commerce du globe. Une seule plante dont la botanique enrichira l’Europe, peut influer sur le sort de plusieurs millions de familles[1].

Parmi cette foule de connaissances, les unes de théorie, les autres d’application, dont la propagation et les progrès sont avantageux au public, il y en a heureusement beaucoup que les particuliers sont personnellement intéressés à acquérir, et dont la société peut se dispenser de payer l’enseignement. Un entrepreneur de travaux quelconques cherche avidement à connaître tout ce qui a rapport à son art ; l’apprentissage de l’ouvrier se compose de l’habitude manuelle, et en outre d’une foule de notions qu’on ne peut acquérir que dans les ateliers, et qui ne peuvent être récompensées que par un salaire.

  1. L’introduction de la pomme de terre en Europe a déjà exercé une fort grande influence sur nos populations. Si, comme on l’espère, on parvient à y naturaliser le lin de la Nouvelle-Zélande, qui donne des filamens plus longs, plus fins et beaucoup plus abondans que notre lin actuel, il n’est pas impossible que le linge fin ne devienne à aussi bon marché que notre toile la plus grossière ; ce qui influera sur la propreté et la santé de tous les ménages indigens.