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LIVRE TROISIÈME. — CHAPITRE IV.

mille francs en chevaux, en maîtresses, en festins, en bougies, font, relativement à leur propre fortune et à la richesse de la société, un métier tout pareil, au plaisir près que le dernier a peut-être plus que l’autre[1].

Dispensé par les considérations qui sont la matière du premier livre, de m’étendre davantage sur les consommations reproductives ; je dirigeai, dans ce qui va suivre, l’attention du lecteur sur les consommations improductives seulement, sur leurs motifs et leurs résultats ; et je préviens que dorénavant le mot consommations, seul, devra s’entendre, comme dans l’usage commun, uniquement des consommations improductives.

CHAPITRE IV.

Des effets de la Consommation improductive en général.

Nous venons de considérer la nature et les effets des consommations, quelles qu’elles soient, et les effets généraux des consommations reproductives en particulier. Il ne sera plus question dans ce chapitre et dans les suivans, que des consommations dont le but est la satisfaction d’un besoin, une jouissance, et qu’on nomme improductives ou stériles.

C’est par des consommations improductives que l’homme satisfait ses plus nobles désirs, de même que ses goûts les plus vulgaires. Par elles il étend ses connaissances, ses facultés intellectuelles ; il élève ses enfans, adoucit l’existence de sa famille, se rend utile à ses amis, à sa patrie, à l’humanité. Son perfectionnement moral aussi bien que son bonheur, dépendent en grande partie de ses consommations improductives ; mais elles

  1. Comme il est difficile, et même peut-être impossible d’évaluer, avec une tolérable exactitude, les valeurs consommées et les valeurs produites, un particulier ne sait guère que par des inventaires de tout ce qu’il possède, si sa fortune est augmentée ou diminuée. Ceux qui ont de l’ordre en font régulièrement, et même les lois obligent les personnes qui sont dans le commerce à en faire tous les ans. Un entrepreneur ne sait pas, sans cela, si son entreprise n’absorbe pas plus de valeurs qu’elle n’en produit ; il peut, dans cette ignorance, travailler à sa ruine et à celle de ses créanciers. Indépendamment des inventaires, un entrepreneur prudent compare d’avance les valeurs qu’absorberont ses opérations et la valeur probable de ses produits ; ce sont des espèces de devis qui font présumer les résultats, mais ne les assurent pas.