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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

remonter à ses causes et déduire ses conséquences ; et si l’on se trompe, la nature est là qui s’offre à des observations plus exactes et à des déductions plus simples. Cette méthode porte en elle la rectification de toutes les erreurs ; mais les abstractions n’apprennent rien.

§ II. — Du Fermage.

Quand un fermier prend à bail une terre, il paie au propriétaire le profit résultant du service productif de la terre, et il se réserve, avec le salaire de son industrie, le profit du capital qu’il emploie à cette culture, capital qui consiste en outils, en charrettes, bestiaux, etc. C’est un entrepreneur d’industrie agricole, et parmi ses instrumens il en est un qui ne lui appartient pas, et dont il paie le loyer : c’est le terrain.

Le précédent paragraphe a montré sur quoi se fondent les profits du fonds de terre : le fermage se règle, en général, au niveau du taux le plus élevé de ces profits. En voici la raison.

Les entreprises agricoles sont celles qui exigent, toutes proportions gardées, les moins gros capitaux (en ne considérant pas la terre, ni ses améliorations, comme fesant partie du capital du fermier) ; il doit donc y avoir plus de personnes en état, par leurs facultés pécuniaires, de s’appliquer à cette industrie qu’à toute autre ; de là, plus de concurrence pour prendre des terres à loyer. D’un autre côté, la quantité des terres cultivables, en tout pays, a des bornes, tandis que la masse des capitaux et le nombre des cultivateurs n’en a point qu’on puisse assigner. Les propriétaires terriens, du moins dans les pays anciennement peuplés et cultivés, exercent donc une espèce de monopole envers les fermiers. La demande de leur denrée, qui est le terrain, peut s’étendre sans cesse ; mais la quantité de leur denrée ne s’étend que jusqu’à un certain point.

Ce que je dis d’une nation prise en totalité est également vrai d’un canton en particulier. Ainsi, dans chaque canton, la quantité des biens à louer ne peut aller au-delà de ceux qui s’y trouvent ; tandis que le nombre de gens disposés à prendre une terre à bail n’est point nécessairement borné.

Dès-lors le marché qui se conclut entre le propriétaire et le fermier, est toujours aussi avantageux qu’il peut l’être pour le premier ; et s’il y avait un terrain dont le fermier, après son fermage payé, tirât plus que l’intérêt de son capital et le salaire de ses peines, ce terrain trouverait un enchérisseur. Si la libéralité de certains propriétaires, ou l’éloignement de leur domicile, ou leur ignorance en agriculture, ou bien celle des fer-