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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

dement M Mac Culloch a pu dire que la publication de ces principes était la découverte la plus importante et la plus fondamentale dans la science de la distribution des richesses, et qu’elle formait une ère nouvelle et mémorable dans l’histoire de l’économie politique[1]. Les idées de David Ricardo m’ont servi à corriger plusieurs parties de ce traité, principalement dans ce qui à rapport aux monnaies ; mais il ne m’a fourni aucune amélioration à introduire dans ce qui a rapport aux profits fonciers.

Malthus, dans plusieurs brochures et dans ses Principes d’Économie politique, a voulu prouver, d’un autre côté, que le profit du propriétaire foncier et le fermage qui en est la conséquence, ne viennent point du monopole qui résulte de la propriété exclusive des terres, mais bien de ce que la terre fournit plus de subsistances qu’il n’en faut pour alimenter ceux qui la cultivent. Avec cet excédant, le propriétaire foncier a pu acheter les produits du manufacturier et de tous les autres producteurs.

Que la terre, comme tous les agens naturels, contribue à l’utilité qui se trouve dans les produits, ce n’est point un fait douteux ; mais le vent contribue aussi à la production commerciale en poussant nos navires ; cependant il ne peut pas faire payer au consommateur sa coopération. Comment le fonds de la terre fait-il payer la sienne, si ce n’est en vertu d’un privilége exclusif du propriétaire ? M. Buchanan, qui a fait sur la Richesse des Nations de Smith un commentaire où se trouvent beaucoup de sagacité et de raison, l’a bien senti. « Le profit foncier, dit-il, n’est point une addition aux produits de la société : ce n’est qu’un revenu transféré d’une classe à une autre… Le revenu qui paie les fruits de la terre, existe déjà aux mains de ceux qui achètent ces fruits ; et si le prix n’en était pas si élevé, si l’acheteur n’avait rien à payer pour le service que rend la terre, son revenu à lui, acheteur, se trouverait plus considérable ; et ce qu’il paierait de moins offrirait une matière imposable tout aussi réelle que lorsque, par l’effet du monopole, la même valeur a passé dans les mains du propriétaire foncier. »

Le même argument qui représente le propriétaire foncier comme usant d’un monopole qui ne fait entrer dans sa bourse qu’une valeur qui sort de la bourse d’autrui, et comme fesant payer des frais de production sert encore à quelques écrivains pour prouver que le travail seul est productif, et non la terre.

  1. Voyez l’article Économie politique, dans le Supplément à l’Encyclopédie d’Edimbourg, et le Discours de M. Mac Culloch sur l’Économie politique, page 65 de l’édition anglaise.