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PRÉLIMINAIRE.

tre, ceux où il est profitable à tous ; elle enseigne même à apprécier chacun de ses procédés, mais seulement dans leurs résultats. Elle s’arrête là. Le surplus de la science du négociant se compose de la connaissance des procédés de son art. Il faut qu’il connaisse les marchandises qui sont l’objet de son trafic, leurs qualités, leurs défauts, le lieu d’où on les tire, leurs débouchés, les moyens de transport, les valeurs qu’il peut donner en échange, la manière de tenir ses comptes.

On en peut dire autant de l’agriculteur, du manufacturier, de l’administrateur : tous ont besoin de s’instruire dans l’économie politique, pour connaître la cause et les résultats de chaque phénomène ; et chacun, pour être habile dans sa partie, doit y joindre l’étude des procédés de son art.

Smith n’a pas confondu ces différens sujets de recherche ; mais, ni lui, ni les écrivains qui l’ont suivi, ne se sont tenus en garde contre une autre sorte de confusion qui demande à être expliquée ; les développemens qui en résulteront ne seront pas inutiles aux progrès des connaissances humaines en général, et de celle qui nous occupe en particulier.

En économie politique, comme en physique, comme en tout, on a fait des systèmes avant d’établir des vérités ; c’est-à-dire qu’on a donné pour la vérité des conceptions gratuites, de pures assertions. Plus tard, on a appliqué à cette science les méthodes qui ont tant contribué, depuis Bacon, aux progrès de toutes les autres ; c’est-à-dire la méthode expérimentale, qui consiste essentiellement à n’admettre comme vrais que les faits dont l’observation et l’expérience ont démontré la réalité, et comme des vérités constantes que les conclusions qu’on en peut tirer naturellement ; ce qui exclut totalement ces préjugés, ces autorités qui, en science comme en morale, en littérature comme en administration, viennent s’interposer entre l’homme et la vérité. Mais sait-on bien tout ce qu’on doit entendre par ce mot faits, si souvent employé ?