ciper sur ses revenus. Si ce qu’il emprunte ne peut être remboursé que sur un capital, un fonds, c’est une manière de dissiper son fonds. S’il n’a pour rembourser ni fonds ni revenus, c’est la propriété de son prêteur qu’il dissipe.
Dans l’influence que la nature de l’emploi exerce sur le taux de l’intérêt, il faut comprendre la durée du prêt : l’intérêt est moins élevé quand le prêteur peut faire rentrer ses fonds à volonté, ou du moins dans un terme très-court, soit à cause de l’avantage réel de disposer de son capital quand il veut, soit qu’on redoute moins un risque auquel on croit pouvoir se soustraire avant d’en être atteint. La faculté de pouvoir négocier sur la place les effets au porteur des gouvernemens modernes, entre pour beaucoup dans le bas intérêt auquel plusieurs d’entre eux parviennent à emprunter. Cet intérêt ne paie pas, selon moi, le risque des prêteurs ; mais ceux-ci espèrent toujours vendre leurs effets publics avant le moment de la catastrophe, s’ils venaient à la craindre sérieusement. Les effets non négociables portent un intérêt bien plus fort ; telles étaient en France les rentes viagères, que le gouvernement français payait en général sur le pied de dix pour cent, taux élevé pour de jeunes têtes ; aussi les génevois firent-ils une excellente spéculation en plaçant leurs rentes viagères sur trente têtes connues, et pour ainsi dire publiques. Ils en firent par là des effets négociables, et attachèrent à un effet négociable, l’intérêt qu’on avait été forcé de payer pour une avance qui ne l’était pas.
Quant à l’influence du caractère personnel et des facultés de l’emprunteur sur le montant de l’assurance, elle est incontestable : elle constitue ce qu’on appelle le crédit personnel, et l’on sait qu’une personne qui a du crédit, emprunte à meilleur marché qu’une personne qui n’en a pas. Ce qui, après la probité bien reconnue, assure le mieux le crédit d’un particulier comme d’un gouvernement, c’est l’expérience de l’exactitude qu’ils mettent à acquitter leurs engagemens ; c’est la première base du crédit, et, en général, elle n’est pas trompeuse.
Quoi ! Dira-t-on, un homme qui n’a jamais manqué d’acquitter ses dettes ne peut-il pas y manquer au premier jour ? — Non ; il est peu probable qu’il le fasse, surtout si l’on a de son exactitude une expérience un peu longue. En effet, pour qu’il ait acquitté exactement ses dettes, il faut qu’il ait toujours eu entre ses mains des valeurs suffisantes pour y faire face : c’est le cas d’un homme qui a plus de propriétés que de dettes, ce qui est un fort bon motif pour lui accorder de la confiance ; ou bien, il faut qu’il ait toujours si bien pris ses mesures et fait des spéculations tellement