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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

plupart des habitans. Le prix de cette denrée ne baisse pas au niveau des facultés du peuple : ce niveau est au-dessous des frais de production des souliers. Mais des souliers n’étant pas à la rigueur indispensables pour vivre, les gens qui sont hors d’état de s’en procurer, portent des sabots, ou bien vont les pieds nus. Quand malheureusement cela arrive pour une denrée de première nécessité, une partie de la population périt, ou tout au moins cesse de se renouveler. Telles sont les causes générales qui bornent la quantité de chaque chose qui peut être demandée. Et comme cette quantité varie suivant le prix auquel elle peut être offerte, on voit que l’on ne doit jamais parler de quantité demandée sans exprimer ou supposer convenue cette restriction : au prix où l’on peut se la procurer.

Quant à la quantité offerte, ce n’est pas seulement celle dont l’offre est formellement exprimée ; c’est la quantité d’une marchandise que ses possesseurs actuels sont disposés à céder en échange d’une autre, ou, si l’on veut, à vendre au cours. On dit aussi de cette marchandise qu’elle est dans la circulation.

À prendre ces derniers mots dans leur sens rigoureux, une marchandise ne serait dans la circulation qu’au moment où elle passe des mains du vendeur à celles de l’acheteur. Ce temps est un instant, ou du moins peut être considéré comme instantané. Il ne change rien aux conditions de l’échange, puisqu’il est postérieur à la conclusion du marché. Ce n’est qu’un détail d’exécution. L’essentiel est dans la disposition où est le possesseur de la marchandise de la vendre. Une marchandise est dans la circulation chaque fois qu’elle cherche un acheteur ; et elle cherche un acheteur, souvent même avec beaucoup d’activité, sans changer de place.

Ainsi toutes les denrées qui garnissent les magasins de vente et les boutiques, sont dans la circulation.

Ainsi, quand on parle de terres, de rentes, de maisons, qui sont dans la circulation, cette expression n’a rien qui doive surprendre. Une certaine quantité d’industrie même peut être dans la circulation, et telle autre n’y être pas, lorsque l’une cherche son emploi, et que l’autre l’a trouvé.

Par la même raison, une chose sort de la circulation du moment qu’elle est placée, soit pour être consommée, soit pour être emportée autre part, soit enfin lorsqu’elle est détruite par accident. Elle en sort de même lorsque son possesseur change de résolution et l’en retire, ou lorsqu’il la tient à un prix qui équivaut à un refus de vendre.

Comme il n’y a de marchandise réellement offerte que celle qui est of-