partie importante de son livre à confondre ce système. S’il n’a pas réfuté Steuart en particulier, c’est que Steuart n’est pas chef d’école, et qu’il s’agissait de combattre l’opinion générale d’alors, plutôt que celle d’un écrivain qui n’en avait point qui lui fût propre.
Avec plus de raison les économistes français du dix-huitième siècle ont réclamé quelque influence sur les idées de Smith qui, en effet, a pu apprendre d’eux que la richesse ne consiste pas uniquement dans le prix qu’on tire d’une chose, mais dans la chose même qui a un prix. Il a pu facilement étendre à la création de tous les produits, la multiplication des richesses, que les sectateurs de Quesnay n’attribuaient qu’aux seuls produits agricoles. De là aux nombreuses conséquences découvertes par Smith, on n’aperçoit rien qui passe la portée d’un esprit juste et réfléchi ; mais qui peut élever la prétention d’avoir exclusivement formé un grand homme ? était-il demeuré étranger aux progrès que l’esprit humain avait faits avant lui ? N’est-il pas toujours l’œuvre de la nature et des circonstances ? L’événement le plus commun a pu être pour lui le germe d’une découverte importante : c’est à la chute d’une pomme que nous devons la connaissance des lois de la gravitation universelle. L’homme de génie a des obligations aux notions éparses qu’il a recueillies, aux erreurs qu’il a détruites, aux antagonistes mêmes qui l’ont attaqué, parce que tout a contribué à former ses idées ; mais lorsque ensuite il se rend propres ses conceptions, qu’elles sont vastes, qu’elles sont utiles à ses contemporains, à la postérité, il faut savoir convenir de ce qu’on lui doit, et non lui reprocher ce qu’il doit aux autres. Smith, au reste, ne fesait nulle difficulté d’avouer qu’il avait profité dans ses conversations avec les hommes les plus éclairés de France, le pays du monde où il y a peut-être le moins de préjugés, et dans son commerce d’amitié avec son compatriote