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faut embrasser la totalité des questions auxquelles elle peut donner lieu. Rien n’égare plus le jugement qu’une vue partielle et incomplète des choses. Il n’y a pas de mauvaise institution en faveur de laquelle on ne puisse donner quelques bonnes raisons. Il faut pouvoir aussi entendre et balancer les bonnes raisons qui militent contre elle.

C’est particulièrement à cause de cela que la liberté de la presse est désirable. Lorsque la presse est également accessible à toutes les opinions, on peut être assuré que tous les motifs pour ou contre chaque mesure seront allégués, que toutes les conséquences bonnes ou mauvaises seront prévues. C’est la meilleure de toutes les discussions.

Mais aussi, sans liberté, la presse est ce que je connais au monde de plus dangereux. Il n’y a rien qu’on ne puisse défendre lorsqu’on ne craint pas d’être contredit. Il vaudrait cent fois mieux que la presse n’eût jamais été inventée, que de la voir devenir un flambeau trompeur qui n’est propre qu’à égarer. Un tyran qui a tout seul la parole, ajoute la déception à l’ascendant de la force, et je ne connais point de remède à la déception qui ne peut être contredite. Les empereurs de Rome, les sultans de Constantinople, pouvaient, lorsque leurs excès