aurait été obligée d’entretenir des forces militaires dont le commandant général n’aurait pas manqué de l’asservir elle-même. Il ne s’opposait donc pas seulement à ce qui était injuste, mais à ce qui était dangereux. Et s’il lui arriva de dire (ce que Midfort, dans son Histoire de la Grèce, révoque en doute), s’il lui arriva de dire que le projet de Thémistocle était fort utile, c’était pour se conformer à l’expression adoptée par la vanité des Athéniens, qui pouvaient regarder à tort comme très-utile de se rendre maîtres de leurs égaux et d’ajouter à leurs dangers réels sans rien ajouter à leurs jouissances réelles.
Dans cet exemple fameux, et que l’on regarde comme si concluant, l’honnête même en politique n’est donc pas l’opposé de l’utile bien entendu : c’est exactement la même chose. Ce qui est mauvais, ce qui a de mauvaises conséquences dans la morale privée, est mauvais dans la morale publique, dans les relations de nation à nation, ou de gouvernement à nation. Il n’y a pas deux arithmétiques : une pour les gros nombres, l’autre pour les petits.