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mal. Défendre ces plaisirs en considération de leurs mauvais effets, c’est l’objet de la saine morale et des bonnes lois. Mais pour savoir avec quelque degré de certitude quels résultats doivent avoir telles ou telles actions, il faut être passablement avancé dans les sciences morales et politiques ; sans cela, on se méprend sans cesse. On s’impose des maux qui ne vous préservent de rien ; on se permet des jouissances qui doivent être suivies des plus fâcheux effets.

En proscrivant tous les plaisirs, les ascétiques ont prouvé qu’ils ne connaissaient pas toute la morale, le moral de l’homme dans son entier. Ils ont porté un jugement incomplet ; ils n’ont contemplé que les maux résultant de l’abus de certaines jouissances, et ils ont enveloppé dans une même proscription la jouissance avec l’abus, les plaisirs sans inconvénient avec ceux qui étaient escortés d’infortunes, semblables à des gens qui se priveraient de cuire leurs alimens et de se chauffer, de peur de mettre le feu à la maison.

Pline, qui, en sa qualité de naturaliste, n’aurait dû chercher dans l’étude de la nature que les moyens d’étendre les jouissances des hommes, ne voit, dans l’usage agréable de ses productions, qu’un abus, et même un crime. En