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brassant la douleur. Il se peut que les stoïciens se crussent récompensés par l’estime et les applaudissemens de tous les sacrifices qu’ils croyaient faire à la sévérité de leurs maximes. Quant à l’ascétisme des cloîtres, ceux qui s’y livrent de bonne foi paraissent tourmentés de vaines terreurs ; ils fuient un mal imaginaire qui les poursuit. L’homme n’est à leurs yeux qu’un être dégénéré qui doit se punir sans cesse du crime de sa naissance, qui doit se tirer à grand’peine du gouffre de misères ouvert sous ses pas, et acheter, par des instans de peine dans cette vie, des siècles de bonheur dans l’autre. C’est ainsi, ô grand Pascal ! ô toi qui, par ton génie, pouvais exercer une influence si favorable sur le sort des hommes ! c’est ainsi, dis-je, que tu as usé ta vie dans l’abstinence, sous la haire et la discipline, et que tu es mort jeune, victime de cette triste manie, en regret tant de n’avoir pas assez souffert !

Comme il n’y a pas d’absurdité qui ne s’appuie sur quelque raisonnement plausible, il faut bien qu’il y ait une apparence de motif aux principes des ascétiques. On a reconnu de bonne heure que l’attrait des plaisirs pouvait être séducteur dans de certaines circonstances, c’est-à-dire porter à des actes pernicieux, à des actes dont le bien n’est pas équivalent au